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Des nouvelles littéraires du lobe frontal

1 octobre 2016

Poème 1

je ne baise pas j'aime

 

je ne baise pas j'aime

les rebonds de la nuit

la sueur de nos draps 

j'aime te voir de dedans

que nos corps lâchés

chevaux ivres

râlent de concert

et nourrissent ainsi

ce feu de nous deux

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18 septembre 2016

Concours 1

Le premier thème de cet espace de nouvelles -espace parce que le mot concours ne me semble pas bien adapté à la chose, espace de partage, l'espace du dedans comme dirait Michaux (ou encore espèces d'espaces de Perec)- le premier thème donc est le suivant :

La Vengeance

Longueur libre, disons entre 3000 et 10 000 mots.

Bienvenue à tous ! (envoyez votre nouvelle sur mon adresse mail et vous dirai si ça marche pour être publié ici)

18 septembre 2016

Nouvelle 1

« D’abord je veux avec ma langue natale »

 

 

Tout en même temps ! Mon vieil ami aussi créateur que moi perdu dans le jeu d’échecs est sur Toulouse. Il veut boire un pot, son expression ça, boire un pot, sa vie dans les café, à faire des crobars pour les dessins animés qu’il a dans sa tête ! Et cette fille incroyable qui m’envoie des textos dingues :

Au Volcan je t’attends

T ou

Je vais finir cynique

Et j’en passe !

Plus d’un an que j’ai pas croisé l’ami, le miroir de mes œuvres inachevées, et là elle, je la vois bien, déjà bourrée, à textoter, bouteilles qu’elle boit, bouteilles qu’elle jette à la mer…

Moi, j’ai pas tenu une femme contre moi depuis des mois, la dernière dans mon garage debout contre le scooter, dans le noir complet, nos râles, l’odeur de la poussière, des cartons, d’huile, debout, prise, le noir me l’a cachée, je doutais au début d’y être, et la fin rapide m’a confirmé que la cible avait bien été atteinte. Alors, vélo, enveloppe à la boîte aux lettres de la banque, un chèque sans provision pour un autre compte négatif, à fond, et j’ai beau dire au dessineux que j’arrive, qu’on va le boire ce pot, je sais bien que j’ai qu’elle en tête. Et les textos pleuvent toujours.

Plus au Volcan mais Connexion

Tant pis

Et moi, et moi d’ajouter.

Arrête de bouger ! J’arrive !

Je vous passe les textos pleins de jeux de mots à deux balles qu’on s’échange avec lui, je le fais mariner mais bon, pas tous les jours que la jeunette me chauffe…

Vélo, attaches, sueur essuyée par la manche, chemise en vrac, et le sourire, j’essaie mais bon… Pas devant, pas dehors, dedans. Ça y est, je la vois, putain ! Elle danse toute seule avec la baffle, un titre de Gainsbourg, le verre greffé à la main, comme cette femme peinte, avec ces deux mains en crochet à côté de son verre à la terrasse d’un café, tableau gris, noir et blanc, mais elle, non, dans le café, robe courte, bleue, moulante, ses cheveux presque encore attachés. Je reste là, je me montre pas, lui parle pas, me cache presque pour la voir encore, voir sans être vu, toujours. La musique stoppe, marrant, il lui faut un temps pour s’apercevoir que la musique n’est plus, son corps en roue libre continue à se déhancher, mes yeux mangés riraient s’ils étaient pas mordus. Je la laisse retrouver le sol, la vie, j’attends que le pantin s’ancre un peu plus, pas trop, je pense sortir de l’ombre mais juste avant, elle se tourne vers le DJ, et vas-y que je te colle, que je te bave à l’oreille, et lui de profiter, une main qui traîne, deux, elle a de l’avance, moi je suis à jeun, et lui, il profite, même plus besoin d’être musicos pour avoir des groupies, juste DJ ! Bien stoppé dans mon élan, j’hésite, un œil au portable, l’ami dinosaure s’est attablé au bar qu’on avait décidé, merde ! Tant pis, je me lance, droit vers la bombe, elle me voit et en même temps me traverse, ses yeux sont par-delà moi, elle rit, ses fossettes là pour contredire sa perdition, au fond elle tient à ce qu’on la prenne toujours pour la gamine qu’elle est plus. Il dit rien le passeur de disques, il retourne à sa platine. On s’assoit à ses pieds, à l’estrade, on s’entend à peine, elle essaie de faire des phrases qui se tiennent mais moi je vois que ses lèvres, ses seins bleus, son ventre rond, pressé par le tissu. Je laisse tomber le téléphone, tant pis pour le crobardeur de mon adolescence. Mais le sien se met à vibrer sur ses genoux, le chanceux ! Et la voilà parti à parler dans le cornet, j’existe plus, ses lèvres se serrent, elle essaie de pas parler trop fort, elle parle cul avec une copine, des horreurs que lui a fait subir son ex, ex avec qui elle recouche apparemment, le monstre qu’elle m’avait décrit, qu’elle avait vomi il y a trois ou quatre mois, le soir de la tuerie du Bataclan, à la terrasse d’un bar de quartier, aux Minimes. Ses amis étaient là, la garde rapprochée, elle pleurait, elle jurait, elle fumait, elle buvait, ce salaud, les putes qu’il allait voir, le mail avec sa queue en gros plan qu’il envoyait à de jeunes mamies mortes de faim à l’autre bout du net, sa coke, ses orgies, et elle, conne, qui l’avait cru, qui payait tout, loyer, bouffe, conne conne qu’elle se disait ! Et nous à la retenir en marchant pour les toilettes, à lui servir des verres encore et encore, et moi à la raccompagner comme un puceau jusqu’à chez les deux amis qui la logeaient, elle, son sac à dos avec les affaires prises à la volée dans cet appartement qu’elle lui avait laissé à la hâte. Tout y passe, elle arrive plus à se faire discrète, elle pleure, elle se dit folle, elle dit qu’elle peut pas s’en empêcher, ni de boire, ni de le baiser, sa queue, sa queue… Je pense à sa queue moi aussi, j’aurais dû prendre la mienne en photo à mon tour, ça a l’air de marcher ! J’écoute, je reluque, mais j’en ai marre, j’ai repris le mien de portable, je dis à l’ami que je peux plus, que c’est chaud là et puis je me barre, à l’autre bout de la scène, pas loin. Elle me voit pas partir, elle sait plus si je suis là ou pas là, l’alcool la coule. Le DJ passe des trucs que je connais pas, je suis déjà trop vieux, c’est comme Cure mais en pire. C’est bien sans le son aussi, j’entends plus les horreurs qu’elle débite mais la scène est complète, elle gigote, ses larmes s’amusent à faire le tour de ses joues, ses jambes se croisent et se décroisent, je suis plus dans le film comme à chaque fois, éjecté, sur le bord, face à l’écran, ses cheveux ont lâché, ses mèches partout, qui essuient ses larmes au passage, ses mains trop prises, le téléphone et le verre, la musique creuse, ma vie tout autant, je suis là avec ma tête à la Dubuffet, chauve, un caillou, et j’attends, j’attends, j’espère des miettes de cette déglinguée, j’attends les baisers fous, qu’on m’emporte, qu’on m’enfouisse comme dit l’autre poète. C’est ça ma vie depuis trois ans, les heures avec rien, les sourires, les vols, l’ennui, l’alcool, posséder pour pas tomber, s’allonger quand l’énergie est morte, quand le cerveau sait même plus ressasser ses blocages et bosser bosser sur les heures qui viennent après la nuit.

Elle raccroche et c’est comme la musique tout à l’heure quand elle dansait encore, elle sait plus que j’étais avec elle, elle me cherche pas, de toute façon j’existe pas, je regarde c’est tout, ces plus jeunes qui s’agitent et qui croient à l’amour, avec leur peine en toc, un morceau de la mienne et ils s’étoufferaient ! Un petit zeste de réaction, une lumière presque allumée, elle tourne sa tête, à droite, à gauche, je suis à moins de dix mètres en face d’elle mais dans tous les brouillards qui l’habitent, elle devine rien, on est tous des formes vagues, des meubles comme des animaux disparus endormis, fossilisés. Elle reprend son portable, le triture et le colle à son oreille. En même temps presque, le mien vibre dans ma poche, je décroche pas, je la laisse me chercher c’est bon. Je suis malade, faut juste que je me barre ou que je réponde mais pas ça, je la regarde, ses yeux perdus, à m’appeler. Dix secondes peut-être et puis je me montre, elle rit, on commande une autre bière, elle la pinte, moi le demi, on s’assoit aux vieux tonneaux à vin qui leur servent de tables. Elle est naze et je sens comme une gène en moi, bien profonde, à peine si je peux la traduire, j’ai envie de sa peau, même si elle est déjà faite, si tout tourne pour elle, si l’abus que je rêve pue la bière. Et puis, les astres se mettent en place, s’alignent les planètes, ma main sur sa cuisse caresse le nylon, dans mon ventre ça remue, j’ai un coeur car je sens le sang qui afflue d’un peu partout. J’ai le temps de me demander si elle sait que je lui caresse la jambe, je suis même pas sûr, si, elle le sait, elle l’a prise dans la sienne ma main, ses petits doigts me la rendent touchante, deux secondes je nous sens presque humains, pas ces machines sociales qui carburent aux produits de substitution, quand sa main rejoint la mienne et que mes doigts laissent un peu respirer le nylon, il y a des étincelles, tout est possible, cette fraction de seconde me fait croire que tout est encore possible, qu’elle est pas bourrée, que je profite pas d’elle, qu’on est proches, qu’on peut s’épauler, qu’on peut déverser sur l’autre notre ego dégoûté. C’est au tour de nos lèvres d’y croire maintenant, on s’est à peine penchés et nos langues s’entortillent dans l’espoir blanc, le bruit et le souvenir d’une solitude puante. Elle est maintenant le dos contre mon ventre, je sais pas comment on a fait, qui a bougé mais voilà, ses fesses appuient sur mon sexe tendu, ma main caresse la sienne sur son ventre offert. On dit pas grand-chose, j’ai le pouvoir de fermer les yeux et d’y croire un moment, un de ces moments que je m’amuse à suspendre, du bout des doigts et du rêve. Je peux absorber toutes tes merdes, lâche les chevaux, les rênes, appuie-toi, laisse ton verre, ta folie une heure, une nuit. On est fous et alors ? A deux, ça peut passer, fou + fou, ça donne quoi ? On construira rien, je sais plus faire ça, rien, juste on regardera les plafonds, on fera du stop, on dormira sur les plages, on perdra nos clefs, des trucs d’écervelés. Elle est fragile, un oiseau dans mes mains, son palpitant là qui tapote, tout contre. Abstraction de tout, rien autour maintenant.

Le problème c’est qu’elle veut boire toujours, moi ça va, ses lèvres à la bière me remplissent, sa langue fraîche me suffit mais non, boire boire, comme à chaque fois que je l’ai croisée à un comptoir. Je vais chercher sa drogue, j’en renverse un peu au passage sur la jeunesse qui me bouscule, on dirait qu’ils veulent qu’on y croit à leur fabrication de soucis, c’est marrant, on a tout, on le sait pas, se plaindre, boire et en rire au final, comme un réflexe. Alors on boit aussi, j’en ai vraiment pas besoin mais je suis un peu le rythme. Elle a des phrases qui remontent, ses études de philosophie qui viennent s’intercaler dans ses délires, elle a du mal à m’exposer ses idées, puissances et limites d’une certaine dialectique, toujours Hegel et les autres, et ceux qui ont couru derrière pour en vivre, elle, ses profs. C’est pas clair, déjà qu’en temps normal c’est bancal mais là, dans les vapeurs, ça s’effrite. J’opine, je pourrais opiner du chef comme ça pendant des heures, ses hanches contre les miennes à nouveau, les autres qui disparaissent, la foule qui se mange et se noie. Son discours se creuse, comme un lit de cailloux, un souvenir asséché de rivière. Pas grave, les basses avalent ses mots, ce qui compte c’est ma main sur son ventre, ses doigts qui caressent les miens. Mais la biche se cabre, la passion, les horreurs qui la bousculent prennent le dessus, la philosophie s’enterre, les cailloux jetés par sa bouche la recouvrent, plus de philosophie, presque plus d’elle non plus, à la place, petit à petit l’alcool a cerné son cerveau, à la place, une bouche qui me retire ses lèvres, des mots toujours, mais une ribambelle de mots crus, une averse d’images folles, j’ai du mal à suivre, de nos caresses, de nos baisers, on est passés à ses obsessions, la vague l’a renversée, sa tête à terre, son rictus effrayant, les larmes, les horreurs, tout est là, je disparais sous les flux incontrôlés, ses yeux me percent encore, je suis plus rien, elle le sait à nouveau, les sanglots, les cris, sur moi, sa vie, son mec, tout qui crie, et moi silencieux, sa main qui se retire, son ventre qui se contracte et recule, sa voix qui déraille et qui monte, les larmes, tout sort, j’essuie d’un revers mais elle me repousse, elle se répète, la peine la plie, elle est toute recroquevillée, elle va disparaître dans sa crispation, elle va se vomir entière et nous recouvrir, on aura pas existé, une fois de plus. Je peux plus la consoler, rien, personne ne peut. Elle me redit tout ce qu’elle a dit à sa copine au portable tout à l’heure, c’est pire encore là, ça m’est destiné, les flèches empoisonnent l’air, tout crache, feu ! Ses tromperies, les photos, je suis détruite, tu comprends, je suis détruite, détruite tu comprends ! Elle crie, elle est détruite, elle crie, tu vois la douleur, là, tout est remonté, tu vois, elle pleure, je peux plus l’essuyer, rien pour endiguer tout ça, je suis dans son écume, emporté, je parlais d’être enfoui, ben voilà, je pensais pas comme ça, mais ça y est c’est fait, je suis détruite tu vois je sais tu vois détruite je sais si tu savais ma destruction tu arrêterais de me jeter ça tu la sais pourtant je te l’ai dite avant je t’ai dit pour ma vie mes enfants tout je t’ai dit mais tu vois que ta perte je suis détruite tu pleures détruite et moi vide, refroidi, disparu. Tu recommandes, ta carte bleue est tombée, tu la vois pas, je suis bon qu’à la ramasser, qu’à parler au barman à ta place, tu parles plus tu coules, ton code je le tape, t’es cuite, tu bois jusqu’à disparaître.

Rien à dire pour moi, aucun mot sort, tu entraves plus rien, ta peine comme un couteau qui farfouille, ta peine sur toi et sur moi au passage. Une deuxième vague, une deuxième marée plutôt, un tourbillon te renverse encore, je pensais pas possible d’aller plus loin. Après tes je suis détruite je suis détruite, après ses je suis détruite, te voilà à balancer des horreurs, il y avait plus profond encore, elle me dit, tu me dis, j’entends que, elle me dit tu me dis j’entends qu’il faut que je me barre, tu m’expliques, il faut que tu te barres, elle m’explique comment sa nuit va finir, comme toutes ses putains de nuits, que le type là-bas, le DJ et l’autre là, le tatoué au bar, tu le vois, oui je le vois, et l’autre le grand mec baraqué, oui aussi, je les vois tous les trois, tu me dis elle me dit j’entends, ils vont me prendre, ils vont te prendre, ils vont la prendre, tous les trois et même plus, elle va aller dans cette boîte avec eux, elle va baiser avec eux et d’autres, qu’elle connaît et qu’elle connaît pas, elle me dit, tu me dis que je ne suis pas comme ça, pour toi je ne suis pas comme ça, pour elle le type que je suis est pas un type comme ces trois types, elle veut pas me salir, elle veut pas que je me salisse avec eux, je suis pas comme ça d’après toi, d’après elle, elle oui, elle est comme ça, le pire tu sais c’est que j’aime ça, encore mineure je me faisais mettre par plusieurs, tu vois, j’ai été dans une cage, j’ai été emmurée, attachée, prise de partout, tout mon corps est un trou tu vois, les mecs tu vois sur moi, des litres, tu sais pas, t’es pas comme ça, il faut que tu partes, il faut que j’y aille, elle me dit ça, elle pleure, pas les mêmes larmes que les premières, la rage, la peur, j’ai un animal perdu devant moi et je vais la laisser aux prédateurs, aux loups parce que je suis pas comme ça, parce que je suis pas un homme, un père, l’homme qui la sortirait de la forêt, je vais la laisser dans leurs mains, le DJ se marre maintenant, il sait de quoi elle parle, certains s’écartent, ils entendent deux trois horreurs, ça leur suffit, la bière tombe, elle a une clope au bec, elle a du mal à tenir debout, je vais la laisser tomber, barre-toi, je vais les baiser tu vois il y a que ça se détruire tu sais. Se détruire, je connais. Oui, je sais, que ça, se détruire, avoir mal pour se sentir vivant. Elle est contre le mur, les larmes encore, elle me fait une geste de la main, je dois disposer, je dois retourner à ce qu’elle pense être ma vie normale, où on baise pas dans les cages, où on est pas le jouet des branleurs. Grâce à elle, je sais ce que je suis pas, un baiseur, un loup. Première fois qu’une fille me jette en hurlant qu’elle va baiser avec toute la planète et que j’en fais pas partie.

J’aurais dû la protéger, la raccompagner, pas la laisser dans cette folie mais j’ai rien pu faire, elle m’a foutu dehors, me crachant son venin à la gueule, fallait bien que je m’en sorte, penser à moi un peu, le type normé qui va s’enfermer chez lui, cogner les portes de la nuit jusqu’à ce qu’elles s’entrouvrent un peu, que je puisse m’enrouler dans la petite mort jusqu’au matin.

 

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